Dans le ciel au Liban existe une tension entre deux types de postures corporelles : d’une part l'effet neutralisant du bruit des avions de guerre israéliens traversant le ciel, et de l’autre, la sensation de présence dans l’acte de faire voler des pigeons. Pour résister à l'immobilité imposée par le son des avions, j'utilise la caméra comme un outil capable de générer un espace en dehors des structures de pouvoir dominant le ciel. Je collabore avec Mohamad, un éleveur de pigeons à Beyrouth. Diriger le mouvement de ses pigeons exige la présence de tous les aspects de son corps. Il devient une force de gravité à laquelle se réfèrent les pigeons. Il crée ce que Deleuze et Guattari nomment “une ritournelle”, un monde composé de sons, de couleurs et de lignes, un territoire qui résulte d'une forme d'expression. J'écoute le son de sa voix décrivant ce qu'il voit dans son ciel. Ses mots deviennent le refrain d'une chanson conduisant mes mouvements. Je suis les rythmes de son corps tandis qu'il danse avec ses oiseaux. Leur ciel se traduit en lignes , couleurs et son captés par ma caméra. Filmer me permet d'incarner mon centre de gravité. Alors qu’ il crée son monde, je crée mon monde cinématographique.
Réalisateur
Maissa Maatouk